CPF : de la liberté à la co-construction du parcours de formation

Compte Personnel de Formation

Depuis le début de la crise sanitaire, les Français se sont emparés de leur Compte personnel de Formation. Dans le même temps, les entreprises pointent du doigt les dérives d’un système pensé avant tut autour de la liberté des salariés. Est-ce à dire, que le CPF est appelé à évoluer dans son mode de fonctionnement ?

 

La formation continue, une question de liberté de choix ou un enjeu collectif ?

Depuis 2018, la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel a profondément transformé l’univers de cette formation professionnelle continue. A travers le Compte Personnel de Formation (CPF), les autorités publiques ont souhaité donner le pouvoir aux actifs eux-mêmes. Depuis, les évolutions tendent à permettre à chacune et à chacun de choisir, en toute autonomie, les formations professionnelles, qu’il entend suivre. Ce fut à l’époque un changement de paradigme, puisque l’entreprise se voyait écartée de l’élaboration du parcours de formation de ses propres collaborateurs.

Certes, l’entreprise disposait toujours de sa capacité à initier un programme de formation élaboré en fonction de ses propres attentes notamment avec le plan de développement des compétences, mais elle ne pouvait pas influer ni même orienter le choix des collaborateurs. La liberté de choix – avec l’application Mon Compte Formation, tout actif peut s’inscrire et payer sa formation continue en un clic – du salarié s’opposait alors aux objectifs collectifs, que peuvent nourrir les entreprises en termes de compétences et de connaissances.

Des ajustements ont certes été adoptés depuis 2018, sans pour autant changer réellement la donne, même si désormais les entreprises peuvent abonder le CPF de leurs collaborateurs afin de surmonter le premier frein évoqué par les salariés : le coût économique de ces formations.

 

Le co-financement de la formation professionnelle continue en question

Selon la Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle, seules 6000 entreprises avaient ainsi abondé le Compte Personnel de Formation de leurs salariés pour un montant estimé à 49 millions d’euros (chiffres au 30 octobre 2021). Pourtant, cet abondement représente bien plus qu’un simple financement supplémentaire tant pour les salariés eux-mêmes que pour les entreprises. C’est notamment ce que souligne la Caisse des Dépôts et des Consignations. Cette dernière estime qu’un co-financement (et donc la généralisation de cet abondement) permettrait de voir les formations diplômantes être multipliées par 3, et que ce financement multiplierait par 10 la durée des formations. Autant dire que l’enjeu dépasse la simple question économique, mais qu’elle pose la question de l’efficacité et de l’utilité de cette formation professionnelle continue. L’allongement de la durée moyenne de formation permettrait ainsi aux acteurs économiques de trouver une issue plus pérenne face à la pénurie de compétences, que certains dénoncent déjà, notamment en ce qui concerne les métiers de l’informatique et du numérique.

 

Du co-financement à la co-construction du parcours de formation, une nouvelle révolution du CPF ?

En incitant le développement de ce co-financement du dispositif de la formation continue, la commission parlementaire chargée de l’évaluation de la loi « Avenir professionnel » souhaite également que cela initie une co-construction. Cela représente une nouvelle révolution du fonctionnement du CPF, puisque les entreprises sont appelées à devenir parties prenantes du parcours de formation de leurs collaborateurs. Des formations professionnalisantes mais aussi des parcours diplômants, notamment grâce aux opportunités nouvelles offertes par les plateformes de e-learning, répondant à la fois aux aspirations des salariés et aux exigences des entreprises notamment en termes de montée en compétences et de productivité.

Des négociations sont d’ores et déjà engagées pour conduire cette nouvelle transformation. Parce que 2022 reste une année électorale, les entreprises entendent ainsi bien rappeler l’importance de cette question de la formation continue. Ainsi, Geoffroy Roux de Bézieux, président du MEDEF, a qualifié la situation de la formation professionnelle comme étant le « talon d’Achille de la France dans la compétition mondiale ». Pour y remédier, il a fait figurer dans les propositions remises aux candidats et candidates à l’élection présidentielle, la demande visant à instaurer la « codécision sur l’utilisation du compte personnel de formation ». Sera-t-il entendu ?

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